LA QUETE DU BONHEUR
Il y a deux grandes quêtes du bonheur assez différentes : il y a la quête de sérénité c'est-à-dire l’absence de troubles, souffrir le moins possible, c’est la quête typiquement bouddhiste qui vise à diminuer les causes de la souffrance et le désir pour pâtir le moins possible, c’est aussi la quête des stoïciens et épicuriens appelée ataraxie.
Mais il y a une autre voie du bonheur qui ne cherche pas l’absence de troubles, qui ne cherche pas à moins souffrir ou à diminuer le désir mais qui vise plutôt à cultiver la joie pour traverser les épreuves et les peines de l’existence. Il s’agit donc de vivre pleinement ses désirs, ses attachements, son affectivité mais en même temps de dépasser nos problématiques avec la force et la puissance de cette énergie de la joie.
La différence entre joie et plaisir
Le philosophe Bergson nous dit : « le plaisir, c’est une ruse que la nature a inventer pour la survie de l’espèce », autrement dit, si on n’avait pas de plaisir à se nourrir, on oublierait de manger et on mourrait, si on n’avait pas de plaisir à faire l’amour, on ne se reproduirait plus. Tous les plaisirs à la base, c’est la satisfaction de besoins fondamentaux pour la survie,. Par contre, la Joie nous dit Bergson, ce n’est pas lié à la survie, c’est lié à l’accomplissement de la vie, c’est une victoire, c’est tendre vers notre élan vital le plus primordial, c’est parce que nous grandissons, c’est parce que nous atteignons quelque chose, c’est parce que nous nous sentons aimés profondément…
Cela rejoint l’Éthique de Spinoza : la joie est le passage d’une moindre à une plus grande perfection, c’est une augmentation de l’énergie vitale. Chaque fois que nous sommes dans notre énergie propre, que nous sommes en phase avec la vie, il y a une joie qui produit cette augmentation de notre puissance de vie.
Il y a des joies qui conduisent à des tristesses, par exemple dans la vie amoureuse. Si nous fondons notre attirance amoureuse vers l’autre sur des images fantasmagoriques, ce sont des joies passives puisqu’il s’agit de projections. Cette joie est donc fondée sur une illusion et ne relève pas de la réalité et il y aura forcément une désillusion. Par contre la joie active se base sur des relations en phase avec la réalité, c’est à dire sur une connaissance vraie de l’autre, des expériences basées sur l’authenticité d’abord envers soi-même.
L’idée c’est donc de réorienter nos désirs vers des personnes et des situations qui nous font grandir et qui augmentent notre puissance de vie et notre joie. Cela me met-il en joie ? Pourrait-on se demander au sujet de nos relations et de nos diverses situations de vie. Nous pourrions également remettre en question nombre de nos choix, de nos décisions et de nos envies en appliquant ce questionnement.
Nous perdons progressivement notre joie de vivre, car nous nous protégeons de plus en plus, notre égo se construit, nous développons toute sortes de peurs, nous avons de plus en plus d’exigences qui ne sont plus remises en question, et tout cela nous coupe de notre estime, de notre créativité et de notre joie de vivre.
Le taôisme nous invite à accueillir la vie telle est et non telle qu’on voudrait qu’elle soit, à rester dans notre fluidité et simplicité afin de retrouver le lâcher prise. Le lâcher prise c’est retrouver sa souplesse de corps et d’esprit. Il vaut mieux être comme le roseau qui plie et qui s’adapte au mouvement imprévisible de la vie. La joie vient de cette flexibilité et adaptabilité.
Une des choses qui nous met le plus en joie c’est d’être nous-mêmes. Ce n’est pas si facile, car nous étouffons et bafouons notre sensibilité. Bien souvent nous avons été parasités, nous avons perdu la confiance et la foi en la vie. Être soi n’est pas égoïstement vivre tout ce qui nous passe par la tête, c’est être dans la profondeur de notre être.
Plus nous serons reconnectés à quelque chose d’essentiel, plus nous serons reliés aux autres de façon plus véritable. Nous retrouvons à nouveau cette notion de recherche de rester connectés à la réalité et de rechercher les situations et les personnes qui nous font surfer sur la vague de la Joie ancrée.